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Chapitre 38 - Le grand bal

Je suis debout devant le grand miroir et je ne suis pas tout à fait sûre d'être la personne qui s'y reflète. Une robe somptueuse entoure mon corps, le tissu en est rouge vif comme celle que je portais lors de mon premier dîner en compagnie de la reine. Il est orné de jolis motifs formant une multitude de petits lys de la même couleur mais d'une matière différente. Je crois qu'il s'agit de velours. Il y a également des broderies d'or qui se mêlent aux motifs sur le haut de la jupe qui gonfle tout autour de moi ainsi que partout sur l'arrière. De la dentelle fine en or et argent au niveau de mes coudes, où s'arrêtent les manches, et sur la bordure autour de mon cou, vient compléter les détails travaillés de cette époustouflante création humaine. Mes cheveux sont savamment tressés et parés de petites chaînes d'argent qui tiennent toute ma coiffure. Avec cela, quelques fins anneaux d'or ornés de pierres rouges sur certains de mes doigts, en plus de l'anneau offert par Méallan lors de sa demande en mariage. Enfin, on m’a offert une merveilleuse parure de cou, elle aussi d'or et de pierres… mais je ne l'ai pas mise. Je porte à la place le collier de perles de ma famille et je trouve qu'il me rend belle, qu'il éclaire ma gorge comme mon visage. Et surtout, je crois en ce qu'il représente. Avec lui c'est un peu de ma famille qui est là pour le plus grand soir de ma vie.

 

J'ai du mal à croire que je suis bien là. Humaine de la racine des cheveux jusqu'au bout des pieds, prête à épouser l'homme que j'ai choisi, que j'aime et qui est tombé amoureux de moi en seulement quelques jours. Je me souviens de la nuit où je suis allée dans l'antre de la sorcière. J'étais terrifiée mais certaine de ce que je faisais, tellement persuadée de pouvoir me faire aimer, tellement sûre aussi de mes propres sentiments. Je me sens toujours aussi certaine de mon cœur et je suis si heureuse que ma confiance ait trouvé une âme si bonne. Je sais que je ne pourrai connaître que le bonheur à ses côtés car je serai enrichie de la plus belle des âmes et aimée par le plus beau des cœurs !

 

Je soupire, puis souris un bref moment à mon reflet que je contemple quelques instants de plus avant de le quitter pour gagner la porte de ma chambre.

 

Je sens aussitôt la nervosité monter en moi. Beaucoup d'humains sont arrivés ces derniers jours. Apparemment, tout le pays sait que le prince Méallan va se marier et certains ont tenu à être présent ce soir ainsi que demain, bien qu'une autre cérémonie plus importante doive avoir lieu plus tard. Je n'arrive pas à me résoudre à passer cette porte. Je voudrais que Méallan vienne me chercher, mais je sais qu'il est déjà présent dans la salle de réception.

 

J'attends encore quelques secondes avant de me décider à ouvrir la porte. Il n'y a personne dans le couloir, on dirait que j'ai encore un peu de temps pour moi. J'avance prudemment, mes pas étant incertains dans ces chaussures un peu surélevées que je suis obligée de porter. Lorsque j'arrive en haut des escaliers, je m'accroche fermement au bois sur le côté, en même temps que je soulève un peu ma robe de l'autre main.

 

- Miss Nérina vous voilà ! s'exclama Mélanie en me voyant apparaître devant elle quelques instants plus tard.

 

Je lui souris, satisfaite de ne pas être tombée et me refusant à penser qu'il va en être ainsi toute la soirée. Mélanie vient jusqu'à moi d'un pas pressé tout en m'indiquant que je suis attendue. Elle m'amène dans le petit salon où je retrouve Sean, fort bien habillé, qui n'arrête pas de marcher de long en large dans la pièce.

 

- Vous êtes là ! s'exclama-t-il comme Mélanie un peu plus tôt.

 

J'acquiesce en me dépêchant d'arriver jusqu'à lui, heureuse de retrouver un visage connu avant de gagner la salle de réception, même si l'impatience commence à l'emporter sur la nervosité.

 

- Vous êtes magnifique, me complimenta Sean en me dévisageant.

 

Je le remercie d'un signe de tête avant qu'il ne vienne passer son bras sous le mien afin de me conduire au bal.

 

- Le prince Méallan vous attend avec impatience. J'espère que vous êtes prête à être emportée, vous êtes le sujet de toutes les curiosités, me prévint-il très sérieux.

 

Je crois n'avoir jamais vu Sean aussi formel. Il est lui aussi très bien habillé. Ses vêtements sont du même bleu que celui de l'océan et brodés d'or comme les miens. Je hoche la tête et souffle beaucoup d'air, je suis prête.

 

Sur mon signal, Sean se met à marcher, lentement, afin de me laisser le temps de suivre, et nous gagnons la salle de réception. Elle est pleine d'hommes et de femmes, tant que j'ai l'impression qu'il n'y a plus d'espace. Il faut dire que les robes sont très larges et demandent de la place. Au moment où nous entrons, le bruit qui régnait jusque-là dans la pièce diminue au point de cesser tout à fait. Je sens que tous les yeux sont posés sur moi, comme lors du premier repas en compagnie de la reine, mais je suis plus sereine, je sais que je mérite ma place en cet instant, en cet endroit, parce que Méallan m'a choisie. D'ailleurs je ne tarde pas à l'apercevoir, à ma droite, habillé de vêtements aussi somptueux que l'on pourrait s'y attendre et un immense sourire illuminant son visage, me le communiquant aussitôt. Après quelques secondes de vide, il passe aux côtés de plusieurs personnes afin de me rejoindre. Mon cœur bondit à son approche et lorsqu'il me prend la main, je sais que je pourrais tout affronter pour être avec lui.

 

- Vous êtes la femme la plus merveilleuse que je n'ai jamais vue Nérina, me glissa-t-il à l'oreille avant de m'entraîner. 

 

Dans un silence troublé uniquement par le bruit des tissus qui bougent dans l'air, Méallan m'emmène au centre de la pièce où les autres humains s'écartent pour nous laisser de la place. De la musique se met alors à retentir dans toute la salle, mais le monde qui nous entoure m'empêche de voir d'où elle peut venir. Je comprends que je vais devoir danser et bien que cela me rende nerveuse, je suis Méallan et répète les gestes que Sean m'a appris. Chaque pas m'est douloureux, mais je suis au-delà de mon corps, concentrée sur ce que je fais et sur celui qui est en face de moi, pour toujours à partir de ce jour. 

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